• Ce qu’il faut savoir.

Sven est à 60% du temps sous hallucinogènes, 23% du temps sous stimulants, 10% du temps sous sédatif, 5% du temps en redescente et 2% du temps sobre.

Quand il n’est pas au laboratoire, il est à droite à gauche, sans trop savoir pourquoi. Il parle avec des gens en leur racontant des choses improbables, souvent dures et crues. Ces choses sont parfois incohérentes, parfois complètement barrées, parfois très profondes. Ces paroles sont aléatoires, mais en tous cas, il est bavard. A cause de ça il est souvent difficile à suivre mais honnêtement, il ne s’en rend même pas compte. Quand on passe le plus clair de notre temps à tester des produits et à voir des choses que les autres ne voient pas, on est pas à ça près.

Autant dire qu’il se gâche la vie en étant tout le temps défoncé, c’est un putain de surdoué qui pourrait facilement devenir riche avec ce qu’il produit, mais lui ne voit pas les choses comme ça. Il voit ça comme des expérimentations. En fait, c’est juste une certaine façon de voir les choses. Tout le monde voit les choses d’une façon différente après tout. Sven a beaucoup d’idées fixes en tête. Il sait un paquet de trucs et à des avis bien posés sur la plupart des sujets.

Quant à sa famille, il ne voit plus que son frère, Ash, avec qui il est assez proche.

• Entrer en piste.

« - As-tu déjà regardé la pluie ?

Je veux dire vraiment regarder. Voir ces milliards de molécules s’effondrer sur nous, leur vitesse, leur poids, leur couleur, leur texture, jusqu’à la façon dont elles chutent. Et tu as déjà regardé le monde s’écrouler ? C’est exactement la même chose : la chute, le Spleen. Mais c’est normal, la vie fonctionne comme ça. La pluie tombe à cause de la condensation de la vapeur d'eau qui a été évaporée par la chaleur du Soleil puis qui s'est condensée en nuage par le refroidissement dû au mouvement dans l’air. Et paf. Le Spleen. Il suit toujours la montée, partout, pour tout. L’homme est le Soleil du monde. C’est nous qui avons provoqué l’évolution positive de ce monde et qui le violons maintenant. Et chaque jour nous nous faisons dévorer par nos semblables et par notre cupidité, en avançant nous ne sommes capable que de détruire, l’homme est un être par nature dévastateur. Je me souviens que quand j’étais gosse, je jouais à des jeux de constructions que je finissais toujours par casser. Ma mère me disait simplement de ne pas abimer les pièces. Déconstruire pour reconstruire. Mais à force le jeu s’use et s’achève en se brisant.  Et nous ne pouvons rien y faire, à quoi bon se faire chier à essayer de préserver la nature ? C’est dans l’ordre des choses après tout. Le monde mourra dans notre main. Nous avons ce pouvoir et nous ne pouvons plus nous empêcher de jouer avec. Et c’est ça qui est beau. Parce que c’est face à la mort que l’homme est vrai. Nul ne peut mentir face à la grande faucheuse, cette peur qui nous ronge petit à petit, qui nous bouffe de l’intérieur. Alors nous nous trouvons des activités stupides, de quoi oublier notre destin qui est de ne plus exister. Les diversions sont le Spleen de l’homme. La montée, c’est l’ignorance, l’espoir qui n’est pas encore mis en doute. Et quand on se rend enfin compte qu’il est temps d’y passer, c’est le seul et unique moment où on est totalement pur et réel. Mais il ne faut pas avoir peur de la mort. Car c’est par le fait de ne pas aimer ou de ne pas aimer bien, ce qui est la même chose, que nous souffrons de cette lâcheté qui nous ronge peu à peu les entrailles en riant à pleine dents sur nos pauvres êtres vils et sales. Car c’est cet amour, brave et dément, qui nous donne la force de regarder la mort bien en face, parce qu’on aime avec assez de passion pour repousser la mort de nos esprits.

La prochaine fois que qu’il pleuvra, penses-y. »


« - T’es défoncé mec. »


«  - Ouais. »